On assiste, depuis la deuxième moitié du vingtième siècle, à une accumulation étonnante de tentatives d’épuisement, qui témoigne de la très grande force symbolique de cette démarche. L’idée d’une tentative d’épuisement est apparue nommément, en 1974, quand Georges Perec s’est installé place Saint-Sulpice à Paris et a entrepris de dresser la liste de tout ce qu’il voyait, les passants, les oiseaux, les camions, automobiles et autocars, tout ce qui pouvait être noté, les faits usuels de la vie quotidienne. Le projet de Perec n’était pas de rendre compte des faits historiques, dont témoignent déjà les monuments, mais « de décrire le reste: ce que l'on ne note généralement pas, ce qui ne se remarque pas, ce qui n'a pas d'importance: ce qui se passe quand il ne se passe rien, sinon du temps, des gens, des voitures et des nuages.» (1975). Il y a une véritable poétique une façon d’aborder le monde et ses objets en tentant d’en épuiser le sens, la forme ou le matériau même dans un contexte marqué par le numérique et sa gestion tentaculaire. Le texte de Perec est l’exemple canonique des tentatives d’épuisement d’un lieu, et il a laissé dans son sillage d’autres pratiques littéraires, visuelles et sonores. D’autres tentatives d’épuisement sont apparues, tentatives d’épuisement: d’un temps, d’un événement, d’une situation, d’un principe, d’un objet, d’un sujet, d’un corps, des données et des dispositifs.